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    “La valeur d’un homme tient dans sa capacité à donner et non dans sa capacité à recevoir”

    — Albert Einstein

Acquisition de users : Bottom-up ou Top-down ?

(Temps de lecture : environ 8 min)

Je suis le genre de personne à avoir au moins 30 idées par jour, dont une bonne dizaine en startups numériques. Bien entendu, sur les 30, beaucoup sont nulles, certaines existent déjà, certaines sont des anciennes avec un regard nouveau, certaines sont liées à l’actualité, certaines sont irréalisables à mon niveau, certaines ne sont pas viables économiquement… bref, le sujet n’est pas là.

Comment gagner les premiers utilisateurs ?

Peu importe l’idée, je m’efforce à réfléchir à l’acquisition, surtout l’acquisition des premiers utilisateurs. On peut avoir la meilleure idée du monde et bien l’exécuter, mais avec peu de moyens pour démarrer, comment gagner ces 1ers utilisateurs si précieux ?

En ce moment, je retravaille sur un projet perso qui me tient à coeur et qui est une vraie casse-tête UX (et j’adore les casses-têtes).


Pour concevoir l’UX de l’appli, je me pose déjà la question de cette fameuse acquisition des premiers utilisateurs. Bien entendu, j’aurai quelques utilisateurs au départ; des proches et des collègues qui testeront en guise de beta-testeurs… Mais après ?

L’appli en question est B2B, c’est à dire réservé à un usage professionnel. Et donc ma question à 1 million d’euros, c’est :

Faut-il cibler les utilisateurs ou le management ?

NB : Pour ce cas de figure, il s’agit d’un SaaS (Software as a Service) où l’utilisateur final peut s’inscrire et le prendre en main instantanément. Cela ne s’applique pas à un SaaS qui nécessite une intervention technique au préalable pour l’utiliser qui est forcément Top-Down en terme d’acquisition.

C’est un peu la question que pose des marketeurs quand ils commercialisent une nouvelle céréale pour le petit-déj :

Devrons-nous viser les enfants consommateurs de la céréale ou les parents qui tiennent le porte-monnaie ?

Sugared cereals: Should kids avoid at all costs? - CBS News

Cas 1 : Le Bottom-Up => Viser les utilisateurs

Supposons que mon appli répond à un besoin ou résout un problème que rencontrent les gens dans un environnement professionnel.

Les difficultés :

  • Aller chercher chaque utilisateur un par un
  • Instaurer dans l’ADN de l’appli => les mécanismes de croissance (via la viralité/le partage).
  • Faire connaître le produit : Mettre le paquet dans le SEO/SEA/Presse => Miser sur l’acquisition des early adopteurs pour tester et adopter le produit.

L’exemple de Slack

Quand on examine une appli comme Slack, les créateurs ont bien entendu su créer un produit que les professionnels veulent utiliser, et ont intréséqument incorporé les mécanismes de partage/ invitation d’autres collaborateurs dans l’ADN de l’appli.

Donc une des forces suprêmes de leur produit ? L’acquisition Bottom-Up

Le modèle économique de Slack a misé sur le Bottom-Up, c’est-à-dire sur l’usage massif gratuitement de l’appli par les collaborateurs en “bas rang hiérarchique” d’une entreprise. Via une sorte de pression plus ou moins passive, le management se sent forcé de sortir le chéquier pour passer en premium : le “Peuple a parlé”.

(En revanche, je pense que c’était une GRANDE erreur d’UX de laisser au “propriétaire” (celui qui paie souvent issu du management) la possibilité de lire les échanges entre collaborateurs (même en PM/DM) : c’est certainement un argument d’achat pour le management, mais cela augmente considérablement le risque d’abandon par l’utilisateur final qui pourrait se sentir “espionné”).


Cas 2 : Le Top-Down => Viser le Top-Management

C’est ce que beaucoup de SaaS essaient de faire. Vendre leur service au management pour un déploiement imposé sur tous les collaborateurs. Dans le cas d’une vente d’un service à un groupe entier de plusieurs milliers de collaborateurs, c’est tout bonnement génial.

Et quand les SaaS y arrivent, c’est génial ! Imaginez obtenir des milliers d’utilisateurs premium en oneshot ?


Mais pour en arriver là, cela présente tout de même pas mal de difficultés :

  • Atteindre le “Management” (identifier les décideurs et les séduire !)
  • Mettre en place une force de vente (ayant un bon réseau)
  • Mise en concurrence d’un point de vue tarifaire (car il s’agit avant tout d’acheteurs)
  • Avoir un produit abouti (en terme d’infrastructures et sécurité)

On peut avoir comme exemple Office 365. Le collaborateur d’une entreprise ne peut pas s’y inscrire gratuitement, ni individuellement. Sinon, il doit passer par l’achat d’une licence individuelle.

Même si une entreprise peut souscrire à une licence en toute autonomie, le grands comptes le font rarement. Il y a une négociation tarifaire par milliers d’employés.

Le risque : Et si le produit ne plait pas ?

La force de la stratégie Top-down, c’est le fait de gagner gros en oneshot (même si la négo peut être longue). Mais pour l’utilisateur, c’est très frustant de se faire imposer un produit qui ne lui plait pas ou pour lequel il n’est pas habitué.

Et c’est d’ailleurs un problème car certaines Saas n’ont pas forcément un meilleur produit, mais une meilleure force de frappe commerciale.

Autre point plus subtil : Parfois chez certains employés un peu rebels dans le milieu tech, la perception du management est comme un enfant envers ses parents.

A partir du moment où une décision d’achat est prise par un non-utilisateur inexpérimenté, la perception de son choix sera forcément mauvaise, surtout si ce dernier n’a pas consulté les potentiels utilisateurs au préalable.

En tant qu’utilisateurs, certains employés savent EXACTEMENT ce dont ils ont besoin.


Un pari à faire dès la conception

Pour revenir sur mon appli perso avec mes petits moyens, je dois me poser la question stratégique durant cette conception même :

  • Devrais-je créer un parcours d’inscription façon Slack où chaque utilisateur peut être autonome à créer son workplace pour son équipe sans l’accord, ni l’intervention du management ?

OU

  • Devrais-je plutôt réfléchir “Enterprise” et concevoir une inscription “corporate” de masse ?

Dans mon cas particulier, cela affecte également la conception même de l’ADN de mon appli.

  • Devrais-je créer du “Fun” dans mon UX afin de créer de la viralité organique ?

OU

  • Devrais-je rester formel (voire ennuyeux) et corporate afin de séduire le management ?

On peut même se dire que dans mon cas, il pourrait s’agir de 2 applis différentes : Une appli fun à destination d’un humain et une appli “sérieuse” à destination d’une organisation.


Comme pour les marques de céréales…

C’est comme mon allégorie sur la céréale. La marque qui la commercialise peut être confronter à 2 choix stratégiques qui pourraient modifier le produit en lui-même :

Séduire les enfants : En mettant en avant le “fun” de la céréale via un singe, un tigre ou une grenouille sur le paquet + avoir la main lourde sur le sucre => l’enfant deviendra donc prescripteur du produit auprès de ses parents

OU

Séduire les parents : En mettant en avant l’apport nutritionnel et les bienfaits de la céréale pour l’enfant (ou le prix) + diminuer considérablement le sucre => L’enfant risque de ne pas vouloir en manger ou en mangera à contrecoeur car on lui impose.


L’idéal, c’est de trouver l’équilibre parfait…

Je suis dans exactement le même cas de figure, je pense.

Et la difficulté d’un startuppeur ou UX designer en face de ce genre de choix, c’est le temps à consacrer en cas d’erreur de stratégie, car il y a le risque de devoir remettre son nez sous le capot et revoir l’UX dans son ensemble.

Cet équilibre parfait est plus facile à énoncer qu’à trouver… Et je pense que si l’on n’a pas une sorte d’obsession d’UX du produit, l’on ne peut pas y arriver.

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  • Damian Hazlewood

    Insatiablement curieux

    Passionné d'UX, de design de produit (notamment numérique mais pas que... glace8.com), de marketing/ comm, de nouvelles technologies, d'innovation, de comportementalisme, de psychologie, de neuroscience, de tout-ce-qui-geek, de concepts fous, de comédies US/UK (movies + standup), de films/ séries (+ scénarios), de musique, de créativité, et de fooding...

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